AST Groupe - Analyse détaillée (Securibourse)

par Myownway, samedi 15 mars 2014, 18:24 (il y a 3907 jours) @ jacques

Bonjour Jacques,

J'ai apprécié le partage de vos remarques sur AST Groupe.
Vous m'avez aussi obligé à aller plus loin dans l'analyse des points forts et faibles de cette société.
Pour tout cela, soyez-en remercié.

Assurément, certaines de vos interrogations ont été ou sont encore les miennes.
En revanche, certaines de vos affirmations demandent à être confirmées à partir de sources vérifiables.

Je vous réponds point par point au mieux de mes connaissances d'AST Groupe :

1) Les effectifs

Le sujet des effectifs par rapport à un indicateur de performance donné n'est pas toujours simple à démêler et il faut se méfier de conclusions trop hâtives.
En effet, un calcul rapide du ratio chiffre d'affaires (CA) en rapport au nombre d'employés ne suffit pas et il convient de disposer de plus d'informations pour une bonne compréhension de l'entreprise analysée.

Pour AST Groupe, les effectifs se composent de 480 personnes à fin 2012 (rapport annuel).

En évoquant d'autres groupes provinciaux moins fournis, peut-être avez-vous en tête un cas concret que vous connaissez bien > Mais toutes les sociétés et tous les domaines d'activité ne se ressemblent pas.
Cela tient pour beaucoup aux modèles d'organisation adoptés par les entreprises et aux caractéristiques propres des secteurs dans lesquels elles opèrent.

De fait, la valeur ajoutée produite per capita varie fortement selon les secteurs.
L'Oréal, ce n'est pas Sodexo (et inversement) alors même que leurs CA sont relativement proches (23 Md € vs. 18 Ms €). Mais leurs effectifs ne sont pas comparables (75 000 vs. 430 000).
Ce qui n'empêche pas ces 2 sociétés de produire des résultats satisfaisants pour leurs actionnaires !

Le recours à la sous-traitance et à des services extérieurs ou, à l'inverse, la conservation en interne de compétences dont la maîtrise est jugée critique sont autant de choix de gestion propres à chaque entreprise.

Plus concrètement, et à titre d'exemple proche de celui d'AST, je citerai la société cotée Gérard Perrier Industrie (GPI) que je connais également très bien puisqu'elle fait partie de mes investissements.
C'est une société essentiellement de services avec une activité de fabrication (comme AST avec POBI), CA équivalent à celui d'AST (130 M€ en 2012), et, heureux hasard, de la même région lyonnaise.
Entreprise excellemment gérée, ses résultats en témoignent. Ses effectifs sont de 1089 (!) personnes.
Son CA représente essentiellement les prestations de services réalisées par les équipes de GPI, au contraire d'AST où le recours à la sous-traitance pour le montage des maisons (CMI/VEFA) est prépondérant. Réduisant d'autant
les effectifs publiés alors que les matériaux achetés puis refacturés au client final gonflent le CA.

Effectifs affichés et CA ne sont donc pas nécessairement liés. Une entreprise peut être individuelle et faire travailler par ailleurs 10 000 personnes en tant que donneur d'ordre.
Et cette même société peut choisir de comptabiliser les achats de marchandises/de prestations et leurs refacturations dans ses livres. Ou pas, selon les schémas choisis (contrats de commission, de façonnage, etc...).
En définitive, à chaque société selon son secteur et ses choix d'organisation et de gestion particuliers.


Cependant, je comprends votre remarque.
J'ai eu des interrogations à ce sujet en 2010 et j'ai alors questionné la direction financière par courriel pour m'assurer de bien comprendre la hausse vertigineuse à cette date du nombre des employés.

Dans celui-ci, je comparais, non pas les effectifs à proprement parler, mais les charges de personnel (salaires+charges sociales) qui avaient augmenté de 5 millions d'euros (ou +50% !) entre 2006 et 2010.
Elles représentaient 19.4 % du chiffre d'affaires en 2010 contre 11.6% en 2006, le CA 2010 (80 M€) étant assez semblable à celui de 2006 (90 M€).

Bien sûr, il y avait l'impact du rachat du Groupe Jacob et l'encadrement nécessaire à la mise en place du réseau de franchisés (Natilia).
Cependant, en plus d'une unité de production, les services commerciaux (+28%), administratifs (x 3), techniques (+69%), etc... avaient été largement étoffés et des fonctions avaient été créées (Qualité, Juridique,...).
Soit de 212 employés en 2006 à 421 en 2010. Près du double....

La direction financière m'a alors répondu ce qui suit : << le périmètre de consolidation du groupe AST est totalement différent à celui de 2006.
Le groupe AST a intégré de nouvelles activités qui comme tout développement organique entrainent des frais de création avec un retour sur investissement à court terme, voir moyen terme.
De plus AST groupe continue son maillage géographique en ouvrant chaque année de nouvelles agences et de nouveaux centres techniques.
Enfin la conjoncture économique de 2010 est bien différente de celle de 2006.>>

Effectivement !
Avant 2008 les maisons se vendaient en grand nombre, comme des petits pains, avec peu d'agences et de centres techniques mais la période qui a suivi est devenue bien plus exigeante à tous les niveaux.
Si auparavant les clients venaient spontanément à l'agence, il a fallu pour les constructeurs aller davantage vers les clients en leur offrant plus de services, plus de suivi et de sécurité.
Concurrence accrue, nécessité de s'étendre sur le territoire national, besoin de se structurer davantage, internalisation de certaines fonctions, POBI, développement de Natilia, le doublement des effectifs semblerait donc se justifier.

Pour m'en assurer, j'ai souhaité comparer AST avec son concurrent le plus semblable, Maisons France Confort (MFC). Mais, pour les raisons déjà citées, l'exercice est incertain.
Par exemple, il pourrait être argué que la spécificité d'AST sur les achats de matériaux (voir analyse précédente) exige un département des achats plus étoffé. Mais que ce choix améliore in fine les marges, ce qui est exact.
De même, quelles sont les activités conservées en interne ou sous-traitées et, lors de l'établissement des états financiers, les classements comptables ont-ils été bien respectés > (*)
(*) en achats ou en services extérieurs selon que la sous-traitance est intégrée directement ou non au produit/service vendu - d'expérience, les règles de comptabilité à ce sujet ne sont pas toujours suivies par les services du même nom...

Au-delà de ces difficultés, la comparaison avec MFC des charges de personnel sur chiffres d'affaires pour la seule activité CMI/VEFA d'AST a donné les ratios suivants pour 2012 :
AST : 20 M€/118 M€ = 17 %
MFC : 79 M€/563 M€ = 14%

A noter, concernant AST, de fortes disparités entre la CMI à 21.5% et la VEFA à seulement 11.6% !
Y aurait t'il un déséquilibre ponctuel du côté de la CMI >
Difficile à dire car je crois comprendre (sans certitudes cependant) que les centres techniques sont partagés avec Natilia et que ceux-ci interviennent lors de la défaillance de franchisés pour la reprise de certains chantiers.

En dernier recours, les marges nettes devraient être le juge de paix en tant qu'indicateur ultime gommant les choix de gestion et mettant en évidence les performances réelles de ces 2 sociétés.
Elles ont été en 2012 de 3.26% pour MFC et de 4.31% pour AST (CMI/VEFA uniquement).

Pas de conclusion radicale donc, pour ma part, à ce sujet.
Toutefois, à la lumière des dernières années, il semble que les effectifs actuels permettraient d'absorber facilement un net surcroît d'activité s'il se présentait (par exemple, les ventes 2010 ont crû de +32%).
Être réactif et prêt à répondre à une demande en nombre avec une organisation bien rodée est incontestablement un atout et peut constituer une économie (personnel déjà formé).
L'objectif étant de trouver le juste équilibre....
Et comme déjà noté, le "couple" POBI/Natilia devrait doubler à terme les capacités de construction de maisons par rapport aux activités historiques CMI/VEFA.

Aussi, à force de lire les déclarations d'A.Tur, j'ai fini par comprendre un peu du personnage et de sa philosophie.
Et ce dernier répète à l'envi que son obsession est la baisse des coûts pour améliorer sans cesse la compétitivité de l'entreprise, gagner des parts de marché et... permettre au plus grand nombre l'accès à un logement (via AST cela va de soi !).


2) La franchise Natilia

<<vous avez oublié les 1.5% de rétrocession de l'assurance>> Merci d'indiquer vos sources.
Le site officiel Natilia indique des redevances d'exploitation de 5% et de communication de 1.5% qui sont bien prises en compte dans mes estimations.
En jetant un rapide coup d’œil sur les sites proposant des franchises, il me semble qu'au-delà d'un total de 6.5% de redevances, il pourrait être difficile d'intéresser des candidats.

<<les RFA sur les matériaux>> S'il s'agit de ristournes obtenues auprès des fournisseurs, vous avez probablement raison.

<<de faibles pertes - de 300 kE>>
Sur l'exercice 2012, les défaillances des franchisés ont amené à provisionner 118 K€ dans les comptes de Natilia et 0 K€ dans ceux de POBI.
Au 30/06/13, les dotations nettes pour provisions et pertes de valeur sont de respectivement 248 K€ et 377 K€.
Au bilan, le total des provisions pour dépréciation des comptes clients se monte à 1 142 K€ (!) contre 331 K€ au 30/06/2012.
La période récente a été particulièrement difficile pour la construction de logements et le réseau des franchisés est certes jeune mais il y a une certaine urgence à le consolider !

<< Les défaillances 15 ou 16 à ce jour... ont considérablement ralenti le développement.>> Parfaitement exact. La mauvaise conjoncture économique et le moral des ménages qui en a découlé n'ont pas aidé.
(j'espère ne pas me tromper en employant volontairement un temps au passé)

<<Même si les recrutement ont été effectué par Monsieur Delafontaine ils ont été validés par Alain Tur. On peut rajouter à l'erreur de casting une direction de la Franchise sans réelle capacité d'animer et de gérer un réseau.>>
Ces informations ne peuvent venir que de sources internes. La plus grande prudence est en conséquence requise dans le traitement de ce qui m'apparait comme des considérations très personnelles.

<<Sur le réseau seules 3 ou 4 franchises sont bénéficiaires et aucune ne publie ses résultats.>> Vos dires m'apparaissent comme contradictoires. Comment savoir >
Il est exact que des informations précises à ce sujet manquent mais le dépôt des comptes, pourtant obligatoire, est du ressort des seuls franchisés et non de Natilia.

<<un basculement complet de tout le réseau vers la concurrence>> Un contrat lie juridiquement les franchisés à Natilia pour 7 ans (cf. site Natilia).
Et effectivement, en cas de rupture, il faudrait pour les franchisés trouver une source d'approvisionnement équivalente aux produits livrés par POBI. Ou changer de concept.


3) Les ventes

<<Ast communique en ventes brutes, pour rassurer l'investisseur>> Cela me semble correspondre aux standards de la profession, il en est de même pour MFC.
Tout comme les états financiers, il convient pour toutes les sociétés de communiquer les chiffres à leur disposition à des dates de clôture déterminées.
Bien malin celui qui est en mesure de savoir lesquels parmi les prospects vont annuler leurs engagements ou ne vont pas obtenir de financement.
Il en est de même pour l'entreprise qui publie un chiffre d'affaires réalisé et dans le même temps comptabilise une créance qui pourrait être sujette plus tard à provision, voire à une perte définitive.
J'ai noté qu'un intervenant avait indiqué, qu'après le choc 2008/2009, le ratio de désengagement était actuellement revenu à un niveau normal (malheureusement mes notes ne précisent pas la source).

<<Ast communique ses ventes globales incluant les ventes des franchisés qui ne rentrent pas en compte dans le CA d'AST....>> Cette façon de procéder m'apparaît juste.
Cela revient au questionnement sur les effectifs et sur les choix de gestion des directions des sociétés.

Prenons un exemple simplifié : cas 1 : AST vend une maison dans le cadre de la CMI pour 87 K€ H.T. (prix moyen) ; cas 2 : 1 franchisé Natila vend une maison dans le cadre du réseau pour 100 K€ H.T. (prix estimé).
Les hypothèses ( voir "analyse détaillée" ) de marges nettes sont les suivantes : cas 1 : 4% ; cas 2 : 3%
Les CA publiés dans les comptes d'AST Groupe sont les suivants : cas 1 : 87 K€ ; cas 2 : 100*6.5% = 6.5 K€
Et les résultats nets sont dans le cas 1 : 87 * 4% = 3.5 K€ et dans le cas 2 : 100 * 3% = 3 K€

Ce qui importe à l'investisseur, c'est combien l'entreprise gagne sur ses différentes opérations.
Peu lui importe les schémas d'organisation et les statuts des activités tant que cela optimise les bénéfices et/ou réduit les risques pour son investissement..
En conséquence, il est important pour l'investisseur de connaître le nombre de ventes réalisées par les franchises au même titre que les ventes réalisées en direct par AST.
Car ces 2 canaux de distribution impacteront directement les résultats d'AST Groupe qui, à leur tour, permettront de le renseigner sur la valorisation à donner à la société, en plus du versement des dividendes ou du financement de développements futurs.

Et à l'inverse, comme déjà souligné, le CA d'AST Groupe, tel qu'il apparaît, ne reflète pas le fort développement du CA du groupe de 85 M€ en 2010 à 156 M€ (*) en 2012.
Si ces calculs sont exacts, le CA a potentiellement doublé en 2 ans ! Mais la base 2010 était particulièrement faible (ventes de 2009) après un pic historique à 100 M€ en 2008 (ce qui ferait encore +50% !).
Cette performance est néanmoins remarquable. Une stabilisation du réseau à moyen terme permettra de le constater au niveau des résultats. Pour l'heure, c'est encore mitigé.

(*) estimation du CA généré par le réseau Natilia : 322 maisons vendues en 2011 (ou 2 M€/6.5 K€ au titre des redevances = 307 maisons), construites et facturées en 2012, au prix de vente de 100 K€ H.T. par maison, soit un total de 32 M€.
A ajouter au CA réellement réalisé de 126 M€ et en retranchant les redevances de 2 M€, soit : 32+126-2 = 156 M€.


4) Team Invest

A. Tur fait effectivement partie de Team Invest qui regroupe les principaux dirigeants d'AST Groupe.

<<ont contracté un emprunt et le remboursement annuel est conditionné au versement du dividende.... pour couvrir l'annuité.>> Merci d'indiquer vos sources.
Pour ma part, je n'ai pas d'autres informations que celles figurant sur ce document : http://www.ast-groupe.fr/fichiers/actualites/CP-AST-TEAM_INVEST_VD4.pdf

<<le compte VMP a considérablement fondu>> C'est exact.
La jadis copieuse trésorerie a financé le nouveau siège social, les avances à la filiale POBI pour ses investissements et les stocks en VEFA dont certains dans le sud de la France tardent à s'écouler (fin de la commercialisation en 2014 selon le dernier communiqué).
La trésorerie nette de dettes à fin 2013 devrait être proche de l'équilibre.

Concernant le dividende, celui-ci a été régulièrement versé, y compris ces dernières (difficiles) années.
Toutefois, l'environnement du secteur devraient amener la direction à la prudence et une baisse de son montant serait envisageable.

<<une vraie question de fond que fait AST en bourse >>> C'est LA question.
J'avais supprimé ce paragraphe traitant de ce sujet hautement important lors de ma précédente intervention déjà très (trop) longue. Sans doute à tort.

Je m'interroge aussi sur les avantages liés à la cotation d'AST Groupe.
Pas de nécessité de lever des capitaux et en matière d'image, il n'y a pas dans la clientèle d'AST de clients internationaux susceptibles d'être rassurés par sa présence sur le NYSE...
C'est plutôt tout le contraire, quand on connaît la perception négative des marchés financiers en France.
Certains se servent même des forums financiers comme tribune pour dénigrer la société ou se plaisent à énumérer (voir forum dédié Boursorama), les unes après les autres les défaillances, malheureusement bien réelles, des franchisés Natilia !

Le même questionnement est valable pour MFC. Est-ce alors par mimétisme de son grand concurrent >

Un retrait pourrait certainement être envisagé.
Mais en tant qu'actionnaire, et même si mon coût moyen d'acquisition est assez proche du cours actuel, un retrait est impensable à ce cours (2.50€) compte tenu des perspectives favorables à moyen terme.
A 9 M€ pour la totalité du flottant, je préfère penser à une plaisanterie de votre part (ou vous n'êtes pas actionnaire) en comparaison des évaluations présentées (à hauteur de 30% [flottant]) lors de mon post précédent.
Sauf à permettre à ces éventuels initiateurs une excellentissime opération financière ! (je n'ai pas retrouvé le cours d'introduction).

L'hypothèse la plus pertinente, c'est celle qui a ma préférence, serait de faciliter à terme une cession d'AST Groupe lors d'une valorisation opportunément haute par le marché. Qui vivra verra....

A noter également que depuis le démarrage d'un nouveau contrat de liquidité (animateur de cours) en novembre dernier avec la société Louis Capital Markets, celle-ci a vendu nettement plus de titres qu'elle n'en a achetés :
ventes de 11 600 titres contre des achats de 3 500 titres.
Alors que le cours de l'action AST n'est pas flamboyant, cela revient à lui mettre un peu plus la tête sous l'eau et cela interroge.
Mais ne connaissant ni leur métier ni leurs objectifs, il ne m'est pas possible d'en tirer une quelconque certitude.


Myownway
Actionnaire individuel AST Groupe


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