Monnaie papier, cigales et fourmis (Securibourse)

par Graham ⌂ @, dimanche 22 novembre 2009, 15:29 (il y a 5482 jours) @ cudy

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Il faut partir de la composition des fonds en euro.
Les fonds « euro » des assurances-vie sont principalement investis :
-obligations : 85% à 90%.
Par souci de sécurité (signature du débiteur) et liquidité du marché, l’essentiel des obligations sont des emprunts d’état. L’investissement en obligation d’entreprise reste assez marginal.
-actions : 5% à 15%
-immobilier : inférieur à 5% le plus souvent et marginal
-autres actifs dont or : inférieur à 5%
Il faut ajouter à cela que chaque fond comporte ce que l’on nomme des « provisions techniques » qui servaient originellement à se prémunir contre une dépréciation des actifs volatiles (surtout actif « action ») afin de garantir la valeur de l’épargne investie. Ces dernières années, ces provisions ont surtout servi à lisser les performances des fonds et à tirer leur rendement artificiellement vers le haut. En conséquence de quoi, les provisions de certains fonds sont très basses, ce qui oblige les assureurs à investir plus encore en obligations parce qu’ils risqueraient de ne plus pouvoir garantir la valeur de l’épargne investie en cas de nouvelle forte baisse d’un actif volatile (taux de rendement minimal ou effet cliquet remis en cause dans le pire des cas)
Partant du constat de la composition en actifs des fonds en euro et de la faiblesse des provisions techniques, on se représente que la valeur de ces fonds est essentiellement dépendante de la performance du placement obligataire et en dedans plus précisément de celui des emprunts d’états.

Quels sont les risques > On peut en dénombrer quatre :

1/ Risque d’insolvabilité des Etats à un terme incertain, que l’on peut estimer supérieur à dix ans, voire quinze ans ou plus.
Les déficits des états développés sont considérables et structurels. La dette publique ne cesse de croître dans des proportions qui pourraient rapidement devenir insoutenable. Pourquoi déjà cela est-il > Les crises financière puis économique ont provoqué une baisse de tous les actifs. Les agents économiques, afin de se prémunir contre la perte de valeur des actifs, se sont reportés massivement vers l’actif sensé le plus sûr : les obligations d’Etat. Ce faisant, les taux d’intérêt ont été tirés vers le bas. Face aux déficits durables et à l’endettement croissant des pays développés, les prêteurs considéreront tôt ou tard que le risque pris est accru et donc exigeront des taux d’intérêts plus élevés. Le relèvement des taux d’intérêts contribuera plus encore à déséquilibrer le budget des Etats. La conséquence est la certitude de déficits structurels pérennes. A terme, il peut n’y avoir plus suffisamment de prêteurs. Les états font faillite. La dette obligataire de ces Etats perd sa valeur.

2/Risque de résurgence de l’inflation.
Les politiques monétaires accommodantes des banques centrales (monétisation de la dette) sont potentiellement susceptibles de causer un retour à l’inflation important. Les avis des économistes sont actuellement très partagés. Pour ma part, je considère que les forces déflationnistes sont actuellement plus agissantes. Les particuliers doivent réduire leur endettement et augmenter leur taux d’épargne. Leur salaire, pris globalement, en raison de la mondialisation et du progrès industriel et technologique des pays émergents, n’a aucune chance de progresser. Ces phénomènes limiteront à court et moyen terme la consommation et provoqueront des prix à la baisse (matières premières comprises). A plus long terme (dès cinq ans) et quand l’économie mondiale se redressera, la quantité de monnaie créée nécessairement impactera le prix des matières premières et le prix des choses consommables. Nous aurons alors ce phénomène étrange qui n’a pas été constaté lors des précédentes phases d’inflation de hausse des actifs et des prix à la consommation, sans parallèlement hausse des salaires (pour cause de mondialisation du marché du travail). La monnaie perdra de sa valeur et les consommateurs occidentaux perdront en pouvoir d’achat. Au niveau du placement obligataire, un retour de l’inflation provoquera un rehaussement des taux d’intérêts. Les fonds en euro étant investis en obligations anciennes servant de faibles taux d’intérêts serviront des taux de rendement inférieurs à l’inflation. Ce qui génèrera un rendement réel de l’assurance-vie négatif et une perte de pouvoir d’achat de l’épargne investie.

3/Les fonds en euro anciens risquent de tomber en désuétude.
Il s’agit de la conséquence du cas précédent. Les contrats anciens détenant des obligations anciennes servants de faibles taux d’intérêts, de nouveaux fonds seront créés par les assureurs afin de servir de meilleurs rendement. Si ce phénomène s’amplifie – et ce ne sera avéré que si la différence de rendement entre les contrats anciens et les contrats nouveaux devenait très importante - il y aura risque de désinvestissements forts, c'est-à-dire de rachat, sur les contrats anciens. Depuis quinze ans ce cas de figure est courant. Les assureurs délaissent certains contrats anciens au rendement médiocre au profit de nouveaux sensés assurés une meilleure rentabilité. Cela n’avait pas de conséquence. Le rachat sur des anciens contrats se matérialisait par des plus-values sur les produits obligataires. La cause en est à la baisse des taux d’intérêts des obligations depuis quinze vingt ans. Le contexte sera différent. Les taux d’intérêts iront croissants. Les assureurs seront contraints à matérialiser des pertes sur les obligations plus anciennes, sans nécessairement de provisions techniques suffisantes. Dans les cas extrêmes, il pourrait y avoir suppression de l’effet cliquet et taux de rendement négatif. Si une telle extrémité se produisait, il y a fort à parier que la législation serait modifiée pour protéger les assureurs contre une vague de rachat massif. La conséquence serait pour les contrats anciens une épargne immobilisée servant un rendement inférieur à l’inflation et donc toujours une perte de pouvoir d’achat de l’épargne investie.

4/Risque de perte de valeur de la monnaie
Il ne s’agit pas directement d’un risque technique. Il s’agit du risque de la perte de valeur des monnaies occidentales contre les monnaies des pays émergents. L’épargne investie en obligations dans l’assurance-vie l’est essentiellement en obligations d’états européens, c'est-à-dire en euro. La perte de compétitivité des économies américaines et européennes est assez grande à moyen-long terme. Une conséquence très probable à longue échéance (dix ans et plus) est que les monnaies américaine et européennes se déprécient par rapport aux monnaies étrangères. Or, le rattrapage technologique et économique des économies émergentes ira croissant. On continuera toujours à délocaliser et on produira toujours plus là-bas, production que l’on devra importer dans des monnaies dépréciées. Il y a aura à nouveau perte de pouvoir d’achat.


Voilà présentés sommairement mon appréhension des risques principaux qui entourent les monnaies des pays occidentaux. Par voie de conséquence, j’en extraie les risques qui me paraissent envisageables pour nos placements dans « la monnaie ». Bien évidemment, je ne suis pas en mesure de dire si un des scénarios présentés se réalisera ou non, ni quand. Mais la probabilité que l’un ou l’autre se réalise devient, au fur et à mesure des politiques monétaires engagées par nos gouvernements et nos banques centrales, de plus en plus certaine avec les conséquences que l’on peut craindre. C’est la raison pour laquelle je me suis persuadé depuis quelque temps que demeurer investi dans « la monnaie » et de surcroît dans une dette d’un état dispendieux est la plus mauvaise chose à faire actuellement. C’est pourquoi je crois aussi qu’à horizon de quinze ans, le placement en assurance-vie sur des fonds en euro devrait être plus que médiocre et ne garantira en rien contre aucune forme d’érosion de la monnaie. C’est pourquoi, je considère toujours que la meilleure façon de se prémunir contre l’érosion de nos monnaies est d’être investi sur de grandes valeurs internationales qui réalisent déjà et qui réaliseront plus encore dans l’avenir une bonne part de leur chiffre d’affaires dans les pays émergents.

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