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La mondialisation se poursuit...

par jmp ⌂ @, Boulogne/Mer, jeudi 15 juin 2006, 09:23 (il y a 6727 jours) @ jmp

La mondialisation se poursuit, mais l'Amérique ne la mène plus

L'ANALYSE DE

JEAN-MARC VITTORI

Il est des rumeurs tenaces, comme les millions de Chirac au Japon, le troisième enfant caché d'Albert de Monaco ou la prochaine nomination de Carlos Ghosn à la tête de General Motors. D'autres présentent l'avantage de pouvoir être balayées d'un chiffre. C'est le cas de cette fameuse mort de la mondialisation, évoquée dans les milieux « alter », dans d'honorables revues et parfois jusque dans les salles de marché. La mort > En trois ans, le commerce mondial aura progressé... d'un quart ! Ce n'est pas un simple effet de loupe. Depuis dix ans, les échanges mondiaux de biens et services ont presque doublé. Même frénésie pour les capitaux : l'an dernier, un montant record de près de 500 milliards de dollars a migré des pays riches vers les pays en développement. En réalité, la mondialisation s'accélère. Et ses excès les plus délirants, qui acheminent par exemple les fraises sur les marchés de Noël, n'ont pas encore été arrêtés par le récent triplement du coût de l'énergie.

Pourtant, il y a bien un malaise. Ses icônes patinent. Coca-Cola ne parvient plus à faire progresser ses ventes sans sacrifier ses profits, McDonald's est sous les feux d'une critique acerbe, General Motors est au bord de la faillite. Le pays le plus riche du monde, les Etats-Unis, emprunte massivement au reste de la planète et ses universités ont plus de mal à attirer des étudiants étrangers. La tentation protectionniste monte. La démocratie version américaine a du mal à s'implanter en Irak. Que se passe-t-il >

En réalité, ce n'est pas la mondialisation qui s'épuise, mais sa forme qui a prédominé depuis la fin de la dernière guerre mondiale : l'américanisation. A partir de 1945, l'ouverture des frontières a été impulsée par les Américains et le dollar est devenu la monnaie de la planète. Les diplomates ont été à la manoeuvre, les militaires parfois, et surtout les entreprises qui ont propagé leurs produits, leur savoir-faire et l'« american way of life ». Après avoir longtemps résisté, les pays communistes ont craqué - événement logiquement lu comme la victoire définitive de l'Amérique. Aujourd'hui, on boit du Coca-Cola à Moscou comme à Pékin.

Comme souvent, le triomphe masquait un affaiblissement commencé longtemps auparavant. Le premier signe fut la vulnérabilité militaire. Le vainqueur glorieux du nazisme a été défait au Vietnam (c'est d'ailleurs à cette occasion qu'un président des Etats-Unis a employé pour la première fois le terme « de-americanization », pour parler en termes pudiques du retrait de ses soldats). Il a subi l'affront terrible des attentats du 11 septembre 2001. Il n'a pas réussi à imposer une démocratie solide en Irak. Ses moyens sont trop limités pour ouvrir un second front en Iran. Sur la scène diplomatique mondiale, Washington rencontre désormais des oppositions énergiques, pas seulement du côté russe. Et l'image des Etats-Unis ne cesse de se dégrader, comme le montre l'enquête réalisée dans quinze pays que vient de publier le Pew Research Center.

Sur le plan économique, l'étiolement de l'américanisation est encore plus évident. Les Etats-Unis ne représentent plus que 9 % des exportations mondiales, contre près de 25 % après-guerre. Le recul s'accentue. Ce poids de l'Amérique a baissé de 3,5 points au cours de la dernière décennie, davantage qu'au cours des trois décennies précédentes, alors que la part de l'Amérique dans la production mondiale stagne un peu au-dessus de 20 % depuis le milieu des années 1970.

Le même mouvement s'observe du côté des entreprises. La sidérurgie, qui fit la plupart des fortunes industrielles américaines au XIXe siècle > Tous ses joyaux ont été repris par des firmes étrangères comme Mittal ou Arcelor, qui s'affrontent désormais sur d'autres terrains. L'automobile, symbole de la puissance américaine s'il en fut > Son leader General Motors cède cette année au japonais Toyota son rang de premier producteur mondial qu'il occupait depuis des décennies et Chrysler s'est fait racheter par l'allemand DaimlerBenz en 1998. L'informatique > IBM a vendu son activité micro-informatique au chinois Lenovo et Dell a du mal à exporter son modèle dans les pays émergents. Coca-Cola > Des marques concurrentes s'attaquent avec succès aux marchés locaux, de la Bretagne à l'Arabie saoudite. Et là où la technologie devient un enjeu industriel et commercial, la bataille se déroule en Asie - comme pour les écrans plats. Bien sûr, il y a encore des marques américaines qui portent haut et fort le drapeau américain aux quatre coins du monde comme Exxon, Microsoft, Citigroup ou Pfizer. Mais ce n'est plus la norme, et ces firmes vantent leur diversité. D'ailleurs, aux Etats-Unis, les gourous du management sont de plus en plus nombreux à être... indiens.

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jean-marie


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