les ventes prématurées

par Graham ⌂ @, dimanche 16 juillet 2006, 17:49 (il y a 6696 jours) @ Graham

L’acte d’achat d’une action ne présente ordinairement guère de difficulté pour la plus part d’entre nous (puisque souvent elle n’est que l’effet d’un optimisme compulsif et d’un besoin d’intervenir et d’agir). Par opposition, la liquidation de cet achat présente quelques difficultés : que ce soit lorsque l’achat initial résultait d’un mauvais choix et qu’il faut limiter sa perte ou encore que ce soit quand l’acquisition était judicieuse mais que la perspective d’une plus-value certaine l’emportait sur la confiance en la conservation de ces mêmes titres.
Je traite ici de ce second point qui est mon erreur passée la plus courante. A l’époque du krach boursier, j’avais fait l’achat de plusieurs titres en déroute, persuadé que les excès commis à la hausse se reproduisaient à la baisse. J’avais une connaissance limitée des sociétés que j’achetais (ce point à une importance qui apparaîtra ultérieurement). A dire vrai, ce point ne présentait pas un inconvénient essentiel dans ce contexte précis. Les titres que j’achetais restaient largement bénéficiaires et ne souffraient que de la panique généralisée et provisoire des spéculateurs à CT et de quelques annonces légèrement inquiétantes qui étaient exagérées. La diversification, les bénéfices pérennes suffisaient à donner une assurance suffisante à mes placements. Il me suffisait de patienter que cette vague de pessimisme s’atténue pour revoir mes titres jouir de critères de valorisation plus normaux. Ce qui ne manqua pas d’arriver et plus tôt que je le crus. Ainsi, sur chacun des placements que j’avais faits, je réalisais des performances toutes supérieures à 50%, et quelques unes à 100% en environ 18 mois. C’est à ce moment que je commis à plusieurs reprises la même erreur qui était de revendre prématurément les titres acquis. Je n’avais nullement alors besoin de liquidité pour de nouveaux achats. Cependant, la revalorisation rapide de mes placements m’avait surpris. Ainsi que tout investisseur dans la valeur, je ne misais pas sur une valorisation des sociétés possédées supérieure à la normale. Je crus le moment opportun d’extérioriser mes plus values. Or il s’avéra que globalement le marché monta et je ne trouvais pas de nouvelles sociétés présentant les mêmes gages de sûreté. Je souffris donc alors d’être insuffisamment investi pendant une phase importante de hausse du marché.
Je tire les leçons suivantes :
-d’une part, l’insuffisance de connaissances sur les qualités intrinsèques d’une société, pour la même raison qu’elle provoque des achats compulsifs, a suscité chez moi des ventes compulsives dès lors que les objectifs de rattrapage des aberrations passées avaient été réalisés alors que les perspectives de ces sociétés demeuraient. Mais je les méconnaissais.
-on ne devrait revendre une action, selon l’enseignement de Philip Fisher, que dès lors que l’on s’est persuadé que ses qualités intrinsèques se sont altérées et jamais sur des considérations de timing, ou de rattrapage de décote…
On revient là au premier point de l’investissement : l’achat. En achetant des titres dont nous sommes, non pas convaincus de leurs décotes ou de leurs dépréciations (ce qui suppose que l’on pense mieux que le marché), mais convaincus de leurs qualités véritables, on évite l’écueil des ventes prématurées, puisqu’on ne vend jamais sauf changement majeur. Au pire, en ce cas, dans un portefeuille suffisamment diversifié on pourrait au moins égaler les performances indicielles (ce qui n’est pas si mal et évite de souffrir les affres de la décision).

En ce dernier trait, on peut rejoindre la considération de crocroc. La vente d’un titre que l’on connaît bien pour extraire des liquidités afin d’effectuer un achat sur une société que l’on connaît moins est une erreur. La revente d’un titre ne devrait résulter que d’un revirement de son jugement sur les capacités bénéficiaires futures de la société possédée. En ce cas, si la société précédemment sélectionnée est vraiment excellente et les autres placements également, il n’y a aucun lieu de se rembrunir pour avoir manqué l’achat d’un titre nouveau (qui rappelle l’on le ne sera la plus part du temps que compulsif) puisqu’à cet état de perfection le portefeuille serait déjà très efficient.

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