Vinci (Fromageux)
On peut trouver tentant d'entrer sur le titre au cours actuel après une baisse de près de 25% depuis avril, d'autant plus que le carnet de commandes, au plus haut à la fin du premier trimestre, s'est encore gonflé de plusieurs commandes, que de nombreux analystes sont à l'achat, et que le titre semble peu cher et offre un profil réputé défensif rassurant dans la conjoncture actuelle.
Vinci a présenté d'excellents résultats 2009, se payant même le luxe d'avoir un RN en hausse, modeste certes mais en hausse quand même, tout en ayant réduit sa dette. L'achat de Cegelec doit apporter une croissance de 10% en terme de CA et s'est faite dans des conditions très favorables aux actionnaires (je reposterai ici l'analyse que j'en ai faite si quelqu'un est intéressé), et la rentabilité passée de la société associée aux synergies annoncées devraient rendre l'acquisition relutive dès 2010.
Pourtant, plusieurs raisons incitent à se méfier.
- Le profil défensif de Vinci n'apparaît plus clairement quand on regarde l'évolution du cours qui amplifie les hausses comme les baisses du CAC.
Les concessions
- Dès la publication des résultats annuels, Vinci a prévu une hausse de CA modérée dans les concessions, tablant essentiellement sur la reprise (constatée fin 2009) du trafic autoroutier des poids lourds et sur l'augmentation des péages. Ca reste à confirmer au vu de la très faible reprise économique.
- Et la rentabilité nette pourrait bien être encore affectée si l'Etat, en quête de nouvelles recettes, augmentait encore la redevance payée par les concessionnaires pour la location des terrains. Cette redevance a déjà été triplée, les concessionnaires ayant obtenu en compensation une augmentation d'un an de la durée de la concession.
Le contracting
- Toujours dans les résultats annuels ils anticipaient une nouvelle baisse, modérée, de CA dans le contracting, tout en préservant les marges.
Le credo de Vinci, aussi bien sous le règne de Zacharias que celui de Huillard a toujours été le maintien des marges plutôt que le CA, on peut donc leur faire confiance sur ce dernier point. Mais le CA pourrait bien baisser plus que prévu en raison des restrictions budgétaires un peu partout dans le monde qui auraient pour conséquence d'annuler ou retarder certaines commandes. Déjà en Espagne des projets ont été reportés.
- En France, la réforme du financement des collectivités locales avec la suppression de la taxe professionnelle est aussi un coup dur. Sauf erreur, 58% des départements ne peuvent pas présenter de budget en équilibre, ce que la loi leur impose pourtant. Vinci fonctionne essentiellement avec des partenariats public - privé dont la réalisation n'est donc pas assurée.
- Mais même pour les projets qui seront maintenus, un autre problème va se poser. En gros, Vinci finance sa part des grands projets de 3 façons complémentaires : Un apport personnel en cash, des prêts de banques privées, et surtout un prêt long terme de la BEI. Ce prêt de la BEI est à la fois une source de financement importante et une caution pour les autres organismes prêteurs. Or le budget européen n'échappe pas aux restrictions, et l'une des conséquences est justement la raréfaction des prêts accordés par la BEI (Banque européenne d'investissement, j'ai oublié de préciser) annoncée officiellement.
Conclusion
Vinci est mon titre fétiche, et pourtant j'en ai vendu la moitié en avril, craignant l'impact de la décision de justice suite à la plainte de la famille d'un salarié. Il semble que cette crainte n'était pas fondée, du moins jusqu'à présent, aucune autre plainte ou rumeur nouvelle n'étant arrivée.
Après la baisse, je pensais racheter mais après analyse je préfère attendre. Je pense que les restrictions budgétaires à tous les niveaux, de l'Europe aux départements, vont peser à la fois sur l'activité (construction, routes, et dans une moindre mesure énergie) et que le financement des investissement dans les concessions sera plus difficile et coûteux.
Je n'imagine pas un instant que Vinci pratique la politique de l'autruche, et donc nous aurons des prévisions actualisées et fiables à la prochaine publication, celle du CA semestriel. Si je ne me trompe pas, elles devraient être revues à la baisse malgré l'apport de Cegelec et peser encore sur le cours. Et si je me trompe et que les perspectives soient inchangées, je doute quand même que le cours bondisse suffisamment pour qu'un achat à bon compte ne soit pas possible. Donc j'attends.
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Merci Léo !