Commentaires sur résultats 2008 (Securibourse)

par Graham ⌂ @, lundi 13 avril 2009, 22:29 (il y a 5705 jours) @ Graham
édité par Graham, lundi 13 avril 2009, 23:06

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Les résultats 2008 de la CIFE, quoique contrastés, sont de bonne facture. Le chiffre d’affaires global progresse d’environ 4% pour s’élever à 187m€. Le résultat d’exploitation baisse d’environ 20% pour s’établir à près de 12,9m€ sous l’effet principal de la dégradation marquée, particulièrement pour la filiale roumaine, de l’activité de promotion immobilière. Ces résultats appellent quelques commentaires.

D’abord, au niveau de la situation financière, les fonds propres augmentent de 8m€ pour s’élever à 66m€. La trésorerie nette progresse de 6m€ sur le semestre pour s’élever à près de 53m€, traduisant l’amélioration du besoin en fond de roulement après une dégradation que j’avais estimé provisoire le semestre précédent. Cet excédent de trésorerie constitue, en temps de crise, un filet de sécurité important. La société se trouve en mesure de supporter plusieurs exercices délicats avec baisse marquée du chiffre d’affaires. Cet excédent lui donnera également la possibilité en sortie de crise d’acquérir à moindre coût des concurrents fragilisés.

Au niveau de l’exploitation, prise globalement, le cash flow généré reste stable à près de 14m€. Plus que la baisse du résultat d’exploitation, ce critère indique la capacité conservée de la société à générer du cash sur l’exercice écoulé. Factuellement, la baisse du résultat d’exploitation traduit des provisionnements et des dépréciations qui n’ont pas causé de sortie de cash pour la société. Une meilleure appréciation de la société exige de séparer les activités de BTP et de promotion immobilière.

L’activité de promotion immobilière n’est jamais que marginale. Son impact sur les comptes consolidés reste limité. Elle ne devrait affecter qu’assez peu les résultats ultérieurs du groupe. D’importantes provisions sur la filiale roumaine ont déjà été comptabilisées sur l’exercice qui ne se renouvelleront plus l’année prochaine. Des provisions sur l’activité de promotion en France sont possibles mais resteront contenus en raison de la capacité générale des promoteurs à réorienter leurs ventes vers les acteurs sociaux du marché. La persistance de la faiblesse du marché immobilier incline toutefois à penser que l’activité demeurera atone les prochaines exercices et engendrera encore des pertes, du même ordre de grandeur, voire légèrement supérieures, à celles de l’année écoulée. La société cependant indique que, tant à l’étranger qu’en France, elle utilisera ses excédents de trésorerie afin de financer sur ressources propres ses programmes de promotion immobilière. Cela revient à dire que plusieurs des programmes apparaîtront en tant qu’immobilisations corporelles et contribueront à générer des revenus via leur location.

L’activité de BTP s’est portée à merveille sur l’exercice, augmentant de 7% pour générer un bénéfice net de 10,5m€ en progression de 6%. Toutefois, ce résultat n’est pas significatif. En effet, l’essentiel du chiffre réalisé résultait du niveau de carnet de commande de l’année passée. Ce dernier, depuis plusieurs trimestres, ne cesse de montrer des signes de déclin. La société confirme ce constat en anticipant une baisse de chiffre d’affaires comprise entre 10% et 15%. Une baisse de 15% conduirait, selon mes estimations, à réduire le résultat d’exploitation à environ 5,5m€ +/- 1,5m€. C’est mon objectif de résultat pour l’année en cours. L’indication de la société d’une préservation du résultat net de la SA CIFE en 2009 ne me parait concerner que les comptes sociaux de la société mère, dépendante des dividendes des filiales. Le risque à moyen terme de plusieurs exercices déficitaires est à prendre en compte avec sérieux. Rien ne permet de présager à plus d’un an de la volonté et de la capacité des services publics à financer le soutien au BTP auquel a fait allusion le président de la république il y a quelques mois. La prospérité de la société est dépendante des financements publics. Si un accident majeur des commandes publiques semble peu probable à court terme, il doit être pris en compte comme assez possible à moyen terme. Selon mes estimations, pris en compte la structure de la société, les masses qui composent son compte d’exploitation, la structure de sa masse salariale avec un volant assez important d’intérimaires, la société ne devrait devenir déficitaire qu’en cas d’un reflux du chiffre d’affaires sous les 140m€, soit consécutivement à une baisse de 25% du chiffre d’affaires. La société n’anticipe pas sur l’exercice une telle baisse. Le carnet de commande en cours apporte une certaine garantie pour l’exercice. Ainsi, la société conserve une certaine flexibilité pour ajuster ses effectifs progressivement et concomitamment à une éventuelle poursuite de la dégradation des activités. Nous n’en sommes pas encore là, bienheureusement, mais la probabilité d’un tel scénario est importante. Je l’estime à 30%. La large trésorerie excédentaire de la société, toutefois, permettrait de supporter un tel choc sur de nombreux exercices. La société, grâce à sa structure bilancielle confortable, présente un très haut degré de viabilité quand plusieurs de ses concurrents péricliteront.

En dernier lieu, j’aborderai l’opportunité d’investir dans le titre. A un cours de 36€, la société est valorisée 43m€ (41m€ pris en compte les actions détenues en propre), à comparer à des fonds propres de 66m€. La trésorerie nette représente près de 53m€. Les immeubles de placement valaient, au 30 juin 2008, 5,5m€. L’addition de la trésorerie et des immeubles représente environ 51€ par action (pris en compte les actions auto détenues). Bref, on paye environ deux euros pour en obtenir trois. Et encore, ne valorise-t-on pas les activités de la société qui conservent de bonnes probabilités de demeurer rentables, au moins sur l’exercice à venir. Si des risques existent, conséquence d’une dégradation accrue de la crise économique et d’une dégénération de celle-ci en crise systémique durable, ils demeurent contenus par l’excellence de la structure financière de l’entreprise. L’entreprise peut supporter sans dommages graves une baisse nette de son chiffre d’affaires (40%) et plusieurs exercices déficitaires. La viabilité de la société est montrée, ce qui assure un haut degré de sécurité. Dans un environnement récessif préoccupant, il est légitime de faiblement valoriser les activités de la société. Les multiples de résultats ne sont pas significatifs dans la mesure où l’évaluation des résultats futurs est hautement incertaine. Un multiple de chiffre d’affaires parait plus cohérent. Il a l’avantage de pouvoir comparer les sociétés d’un même secteur. Dans le cas de CIFE, une valorisation des activités à 25% un chiffre d’affaires prochain estimé à 150m€ est convenable. Elle ajoute une prime légère aux sociétés comparables, résultante d’une meilleure situation financière et de marges habituellement supérieures. La valorisation des activités additionnée avec la trésorerie et les immeubles de placement élève la valeur de l’entreprise à 96m€, soit 80€ par action. C’est mon estimation de la valeur fondamentale de la société dans un contexte de crise. Hors contexte de crise la société eut pu être raisonnablement valorisée sur la base d’un chiffre d’affaires de 180m€ valorisé à 50%. La valeur de l’entreprise se serait élevée à près 150m€ ou 125€ par action. La raison de l’importante décote du titre résulte de son illiquidité structurelle. Peu de fonds peuvent se permettre d’y investir de façon importante, particulièrement dans le contexte actuel de flux négatifs sur le marché des OPCVM spécialisés dans les petites capitalisations. Ce phénomène n’est pas durable. Dans le cas de CIFE, la transmission possible du patrimoine de l’actionnaire majoritaire conduira à moyen terme à augmenter la liquidité du titre. Cette seule circonstance assurera au titre une revalorisation forte, indépendamment des résultats économiques. Il me semble qu’aujourd’hui la CIFE est la société présentant la plus importante décote parmi les sociétés les plus assurément viables du marché parisien. D’autre part, la liquidité, si elle est problématique à court terme, ne présente aucun handicap pour l’investisseur de long terme.

Déontologie :
L’auteur du billet possède dans une forte proportion de son patrimoine des actions de la CIFE.
Il a notamment plus que doublé sa position à un cours de 36€

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