CDS vers "un gel de la situation" ! Que comprendre ? (Securibourse)

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 05:27 (il y a 5893 jours)

" Faire tout ce que les hommes peuvent faire " Publié par Paul Jorion.

Trop peu, trop tard. J’aurais quand même préféré que le plan Paulson « version centre-gauche » passe. Ce ne fut pas le cas : avec 47,3 % de voix en sa faveur, il a raté de peu la majorité. Les parlementaires démocrates ont voté pour à 60 % et les républicains à 33 %. Le compte n’y était pas. L’indice Dow Jones a perdu dans la foulée, 6,98 %. Plus fort que Paris un peu plus tôt dans la journée, avec - 5,04 %.

Qu’est-ce qu’il faut faire > A ce stade-ci, le mieux que l’on puisse espérer, c’est un gel de la situation. Ce serait déjà une très bonne chose. Je le disais il y a quelques jours, quand je résumais l’article qui a paru aujourd’hui dans Le Monde - Economie :
« Je reviens sur l’idée d’un moratoire. Il ne s’agit pas de “résoudre” la crise mais de trouver le moyen d’introduire au moins un temps d’arrêt qui permette de déterminer un plancher » (Le Monde, lundi 29 septembre).

Dans l’article du Monde, « Le piège des Credit–Default Swaps », je suis plus explicite. En voici le dernier paragraphe :

" Mais il faut aller beaucoup plus loin : d’ici à ce qu’un marché organisé puisse être mis en place, un moratoire permettrait d’examiner les conditions à remplir pour que les CDS puissent être relancés sans générer un danger systémique. Et si ces conditions ne peuvent être réunies, il conviendrait de transformer ce moratoire en interdiction permanente. Tant que les autorités n’auront pas réglé la question des Credit–Default Swaps, l’affirmation selon laquelle toutes les mesures sont prises pour résoudre la crise ne sera tout simplement pas sérieuse. "

Arrivé à ce stade-ci, il faut abandonner l’ambition de résoudre les problèmes : il faut d’abord stopper la finance dans sa chute en gelant la situation. Si on tarde trop, il ne restera plus que la méthode ultime, celle que j’évoquais dans un autre billet. J’y reproduisais le texte d’un ex-voto de marins bretons : « Ayant fait tout ce que les hommes peuvent faire, nous nous mîmes en cercle, et nous tenant par la main, nous recommandâmes notre âme à Sainte Anne » (De la prière).
Ils avaient quant à eux au moins commencé par « faire tout ce que les hommes peuvent faire ».

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

Vers une fermeture mondiale des Bourses ... ???

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 05:44 (il y a 5893 jours) @ Alix

Premieres reactions sur le Blog de Paul Jorion :

Jacques dit :
(29 septembre 2008 à 22:42)
Vous avez malheureusement raison ( P…. de républicains! ). Les Clash pourraient rajouter un couplet à leur chanson :”I’m so bored with the USA “. Je préfère meme pas voir la réaction des marchés asiatiques.

Pierre dit :
(29 septembre 2008 à 22:48)
Selon vous, il faudrait donc geler la situation, avoir un temps d’arrêt. Mais est-ce seulement imaginable> Qu’entendez-vous dans les faits > Une fermeture mondiale des bourses jusqu’à une nouvelle réglementation consensuelle mondiale>
Et si ce n’était pas le cas. Ce serait la fin du système> Mais que signifie vraiment la fin d’un système>
La situation semble irréelle. Je ne sais plus quoi penser. Aurait-on franchi une barrière de non-retour, et si oui, que signifierait-elle >

leduc dit :
(30 septembre 2008 à 00:20)
Je ne sais pas ce que tout cela cache, mais il y a certainement quelque chose de louche. Les humains sont des êtres rationnels, même s’ils nous arrive parfois de faire des bêtises. Tant de personnes avaient tiré la sonnette d’alarme depuis si longtemps. Parmi les plus notables “prophètes” en économie, bien sur notre cher Paul, mais aussi Mr Doom alias Nouriel Roubini, des groupes comme LEAP 2020, Lyndon Larouche (oui le bonhomme semble un peu fantasque) et sans doute tant d’autres. Je ne peux pas croire que tant de personnes compétentes et qualifiées, qui ont mis en garde tout le monde contre ce qui allait nécessairement arriver, n’aient pas été écoutées. Ceux qui tiennent les clés du pouvoir économique et politique on péché par ignorance, incompétence, où peut-être je ne sais quelle autre raison.

...Qu'en pensez-vous >
Loic, y a-t-il un precedent > Crise de 29 >

:flower: alix

Une fermeture generale des Bourses ... ???

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 09:04 (il y a 5893 jours) @ Alix

Une autre reaction, celle de Christophe :
" Il me semble que le gel des positions est la meilleure des solutions qui s”offre à nous. Cela n’avait-il pas été le cas dans les jours qui ont suivis le 11 septembre avec la fermeture de Wall-Street pendant une semaine, ou la décision récente des autorités russes de fermer temporairement les bourses > Il faut faire refroidir le système, briser l’emballement, remettre de la raison là où il n’y en a plus. Une fois la part du feu faite comme disent les pompiers et un véritablement plan de continuation établi, alors oui on pourra de nouveau relancer la machine, mais cette fois sans subir la situation.
amicalement,
Christophe. "

Transmis par :
:flower: alix (qui, lui, n'a aucune opinion sur le sujet, qui se sent observateur attentif, dubitatif, et qui attend vos reflexions et vos "lumieres"... avec interet) :-)

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CDS vers "un gel de la situation" ! Que comprendre ?

par labadie ⌂ @, Chaloupe St-Leu, La Réunion, mardi 30 septembre 2008, 10:47 (il y a 5893 jours) @ Alix

Geler quoi que ce soit relève de l'illusion totale. La situation ne s'améliorera pas toute seule dans 3 mois, 6 mois ou 1 an...
Compte tenu de la situation, la vraie valeur du Dow aujourd'hui est de 3000 points (et encore), pas 10 500 : Ce n'est pas un problème de "CDS", de "spéculation" ou de "subprimes" ou de je ne sais quel autre détail sur lequel les "experts" divers se focalisent à tour de rôle.
C'est un problème de crédit tout court.
Il ne s'agit pas de "relancer" un système mort (le modèle économique basé sur la fuite en avant dans le crédit et la désépargne en vigueur depuis plus de 2 décennies aux USA), mais au contraire de détruire au plus vite ce que ce système a produit (une montagne géante de dettes en excès) pour reconstruire sur des bases saines.
Cette purge aura de toutes façons lieu, quelles que soient les "actions", "gels", "interdictions", "plans de relance" que les gouvernements tenteront pour la contrer...ils n'en ont pas les moyens.
Les états feraient à mon avis mieux de garder leurs ressources pour accompagner et aider les classes sociales qui seront le plus durement frappées par la crise à venir plutôt que de tenter d'investir à fonds perdus dans le mirage de la relance d'un système condamné...En cela, le rejet du Plan Paulson (qui m'a surpris) est à mon avis une bonne nouvelle et une décision courageuse.

--
[image]

@ Loic - Psychologie des Autorites... ?

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 13:54 (il y a 5893 jours) @ labadie

» Geler quoi que ce soit relève de l'illusion totale. La situation ne
» s'améliorera pas toute seule dans 3 mois, 6 mois ou 1 an...
» Compte tenu de la situation, la vraie valeur du Dow aujourd'hui est de
» 3000 points (et encore), pas 10 500 : Ce n'est pas un problème de "CDS", de
» "spéculation" ou de "subprimes" ou de je ne sais quel autre détail sur
» lequel les "experts" divers se focalisent à tour de rôle.
» C'est un problème de crédit tout court.
» Il ne s'agit pas de "relancer" un système mort (le modèle économique basé
» sur la fuite en avant dans le crédit et la désépargne en vigueur depuis
» plus de 2 décennies aux USA), mais au contraire de détruire au plus vite ce
» que ce système a produit (une montagne géante de dettes en excès) pour
» reconstruire sur des bases saines.
» Cette purge aura de toutes façons lieu, quelles que soient les "actions",
» "gels", "interdictions", "plans de relance" que les gouvernements tenteront
» pour la contrer... Ils n'en ont pas les moyens.
» Les états feraient à mon avis mieux de garder leurs ressources pour
» accompagner et aider les classes sociales qui seront le plus durement
» frappées par la crise à venir plutôt que de tenter d'investir à fonds
» perdus dans le mirage de la relance d'un système condamné... En cela, le
» rejet du Plan Paulson (qui m'a surpris) est à mon avis une bonne nouvelle
» et une décision courageuse.

Merci de ton point de vue. :-)
Ton analyse, qui a du recul, n'est cependant pas partagee par ceux qui nous gouvernent, par nos Autorites. Eux sont dans le reactif : pas de recul et peu de Culture.

...Alors, nous risquons fort d'en avoir, des "gels", des "interdictions" de toutes sortes. Il faudra bien "agir", n'est-ce pas >
Et puis, et puis... il va y avoir l'aiguillon continu des experts, " l'Autorite morale" assise sur le " Je vous l'avais bien dit ! " Deja, Nourini preconise une chose, LEAP une seconde, Paul Jorion une troisieme...

C'est qu'il va s'en lever des experts dans les prochaines semaines ;-) ! Penses-tu ! Tous ceux qui ont prevus la Crise vont "pousser" sur l'Occident comme des Resistants en 1945, ou des champignons sous la pluie !
Et puis le bon peuple va reclamer ses tetes... a couper ! :angry:

Que nous dit l'experience de 1929 >
Nous est-il possible d'anticiper, ou simplement de nous preparer a certaines reactions stereotypees des Autorites, et de l'opinion, qui risquent de bouleverser nos justes appreciations des marches, de "planter" nos choix >
Par exemple, ceux qui parlent de fermeture des Bourses a l'echelle mondiale sont-ils dans le delire > Ou pas > As-tu quelques reflexions >

Bien cordialement.
:flower: alix»

CDS vers "un gel de la situation" ! Que comprendre ?

par ilanoe @, mardi 30 septembre 2008, 14:42 (il y a 5893 jours) @ Alix

que sont les cds au juste et quels sont leurs implications sur le systeme financier >

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Je n'y connais rien

par jmp ⌂ @, Boulogne/Mer, mardi 30 septembre 2008, 14:55 (il y a 5893 jours) @ ilanoe

mais je sais utiliser les moteurs de recherche:

D'abord la définition:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Credit_default_swap

Ensuite le rapport avec la crise actuelle:
http://www.moneymorning.com/2008/09/18/credit-default-swaps/

http://www.webofdebt.com/articles/derivative-disaster.php

et il y a même des solutions:
http://www.moneymorning.com/2008/09/25/credit-crisis-5/

--
jean-marie

Hors sujet,, pour détendre en ces temps difficiles

par J.L. @, mardi 30 septembre 2008, 15:39 (il y a 5893 jours) @ Alix

» comme des Resistants en 1945, ou des champignons sous la pluie !

Ben, cette année on a eu la pluie, mais pas les champignons ! :-(
Ce sera vraiment l'année catastrophe !!! :-( :-(

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Un texte en français d'un des apôtres de l'apocalypse

par jmp ⌂ @, Boulogne/Mer, mardi 30 septembre 2008, 16:28 (il y a 5893 jours) @ labadie

Personnellement je suis aussi de l'avis de Loïc qu'il y a mieux à faire que le plan Paulson et même si c'est une exception, j'approuve les républicains qui ont voté contre.

http://contreinfo.info/article.php3>id_article=2211

--
jean-marie

CDS : le monstrueux contraire d'une assurance

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 16:59 (il y a 5893 jours) @ ilanoe

» que sont les CDS au juste et quels sont leurs implications sur le systeme
» financier >

CDS : le monstrueux contraire d’une assurance, par Paul Jorion
17 septembre 2008
Les pertes qui éreintent les établissements financiers sont théoriquement garanties par le mécanisme des CDS, les Crédits Default Swaps, par lesquels les entreprises assurent le risque inhérent au crédit. Problème : « les CDS ne constituent que des paris « directionnels » à but spéculatif, » pour lesquels les provisions sont quasi inexistantes.

Par Paul Jorion, 16 septembre 2008 :

Samedi après-midi, les meilleurs spécialistes des Credit-Default Swaps travaillant pour Wall Street furent rappelés d’urgence au bureau. Devant le refus du gouvernement de contribuer au fonds de soutien de Lehman Brothers, ils furent extraits de force à leur environnement familial pour aller calculer combien il en coûterait d’honorer ces fameux CDS si Lehman devait faire défaut.

Rien de surprenant : dans mon billet du matin-même, Lehman Brothers : les proches sont à son chevet, j’écrivais :

Il n’y a plus que des infrastructures à se partager comme dépouilles et... l’écheveau à démêler des paris que tous ces braves gens ont pris sur la mauvaise santé financière les uns des autres sous la forme de Credit-Default Swaps.

Je rappelle en quelques mots qu’un Credit-Default Swap est un type d’assurance contractée à titre privé où le vendeur du swap joue le rôle d’assureur et l’acheteur, d’assuré. Le vendeur remboursera à l’acheteur les pertes que ce dernier viendrait à subir du fait de la défaillance d’un tiers. Pour bénéficier de ce service, l’acheteur du swap verse au vendeur une prime dont le montant est déterminé par le marché en fonction du risque de perte tel qu’il est alors perçu.

La somme totale des CDS contractés aux États-Unis se monte - cela dépend des sources - à 45 ou 62 mille milliards de dollars [1], de toute manière un chiffre proche du total des dépôts bancaires à l’échelle mondiale. L’instrument a été mis au point dans les années 1990 par J.P. Morgan, qui est aujourd’hui encore le principal acteur de ce marché, avec un chiffre de 7 mille milliards de dollars. Citigroup suit, avec 3,2 mille milliards et Bank of America avec 1,6 mille milliards de dollars. Les « hedge funds », les fonds d’investissement spéculatifs, représentent 31 % de ce marché, et les monolines, les rehausseurs de crédit, 8 %.

Bien qu’il présente l’aspect extérieur d’une assurance, il n’est pas nécessaire que l’acheteur du swap soit véritablement exposé au risque couvert. En fait, et le plus souvent, les CDS ne constituent que des paris « directionnels » à but spéculatif. Les établissements financiers ont recouru jusqu’à plus soif à de tels paris portant sur leur bonne santé respective : la somme du montant des contrats représente environ dix fois les pertes qui seraient effectivement subies - je veux dire en l’absence de tels paris. Les CDS ont donc démultiplié artificiellement par dix le risque réel qui préexistait à leur création, créant ainsi le monstrueux contraire d’une assurance.

L’été dernier, quand le crédit s’est tari, les établissements financiers se sont retrouvés englués dans la toile d’interdépendance que les Credit-Default Swaps avait créée entre eux. Cette interdépendance a contribué à fragiliser la partie du système financier qui avait été épargnée par la crise du subprime puisque la chute de l’un d’entre eux risque de se répercuter alors à l’ensemble des autres avec lesquels il est interconnecté, créant un risque systémique de type « dominos ».

Le 2 avril, Ben Bernanke, le président de la Fed, déclarait dans une allocution devant le Congrès : « La faillite soudaine de Bear Stearns aurait débouché sur un débouclage chaotique de positions sur ces marchés. Elle aurait aussi jeté la suspicion sur les positions financières de certaines parmi les milliers de contreparties de Bear Stearns ». La faillite de Bear Stearns aurait forcé au débouclage de l’ensemble des CDS dont elle faisait l’objet, c’est-à-dire à la réconciliation des positions de l’ensemble des établissements qui s’étaient engagés dans de tels contrats, l’insolvabilité de l’un des vendeurs pouvant alors se répercuter sur toute la longueur de la chaîne.

Il y a quelques jours, un commentateur sur un blog financier faisait observer à propos des CDS qu’il s’agit avec eux de « probabilités conditionnelles », la condition en question étant le fait que le marché soit encore opérationnel lorsque les défaillances se manifestent. « Comment imaginer », disait-il, « que Goldman Sachs étant en défaut de paiement, Lehman Brothers [toujours en vie à l’époque] puisse me verser les sommes qu’il me doit sur les CDS qu’il m’a vendus > Pas @#%& très probable ! »

Paul Jorion.

CDS : le monstrueux contraire d'une assurance

par ilanoe @, mardi 30 septembre 2008, 17:13 (il y a 5893 jours) @ Alix

je ne comprends pas completement tout les tenants et aboutissants
mais en gros ce sont des engagements hors bilan et ds le cas de defaut de paiement et d'effet boule de neige alors la crise actuelle ne serait que benine par rapport a ce qu'il pourrait arriver si j'ai bien compris


» » que sont les CDS au juste et quels sont leurs implications sur le
» systeme
» » financier >
»
» CDS : le monstrueux contraire d’une assurance, par Paul
» Jorion

» 17 septembre 2008
» Les pertes qui éreintent les établissements financiers sont
» théoriquement garanties par le mécanisme des CDS, les Crédits Default
» Swaps, par lesquels les entreprises assurent le risque inhérent au crédit.
» Problème : « les CDS ne constituent que des paris « directionnels » à but
» spéculatif, » pour lesquels les provisions sont quasi inexistantes.

»
» Par Paul Jorion, 16 septembre 2008 :
»
» Samedi après-midi, les meilleurs spécialistes des Credit-Default Swaps
» travaillant pour Wall Street furent rappelés d’urgence au bureau. Devant le
» refus du gouvernement de contribuer au fonds de soutien de Lehman Brothers,
» ils furent extraits de force à leur environnement familial pour aller
» calculer combien il en coûterait d’honorer ces fameux CDS si Lehman devait
» faire défaut.
»
» Rien de surprenant : dans mon billet du matin-même, Lehman Brothers : les
» proches sont à son chevet, j’écrivais :
»
» Il n’y a plus que des infrastructures à se partager comme dépouilles et...
» l’écheveau à démêler des paris que tous ces braves gens ont pris sur la
» mauvaise santé financière les uns des autres sous la forme de
» Credit-Default Swaps.
»
» Je rappelle en quelques mots qu’un Credit-Default Swap est un type
» d’assurance contractée à titre privé où le vendeur du swap joue le rôle
» d’assureur et l’acheteur, d’assuré. Le vendeur remboursera à l’acheteur les
» pertes que ce dernier viendrait à subir du fait de la défaillance d’un
» tiers. Pour bénéficier de ce service, l’acheteur du swap verse au vendeur
» une prime dont le montant est déterminé par le marché en fonction du risque
» de perte tel qu’il est alors perçu.
»
» La somme totale des CDS contractés aux États-Unis se monte - cela dépend
» des sources - à 45 ou 62 mille milliards de dollars [1], de toute manière
» un chiffre proche du total des dépôts bancaires à l’échelle mondiale.
» L’instrument a été mis au point dans les années 1990 par J.P. Morgan, qui
» est aujourd’hui encore le principal acteur de ce marché, avec un chiffre de
» 7 mille milliards de dollars. Citigroup suit, avec 3,2 mille milliards et
» Bank of America avec 1,6 mille milliards de dollars. Les « hedge funds »,
» les fonds d’investissement spéculatifs, représentent 31 % de ce marché, et
» les monolines, les rehausseurs de crédit, 8 %.
»
» Bien qu’il présente l’aspect extérieur d’une assurance, il n’est pas
» nécessaire que l’acheteur du swap soit véritablement exposé au risque
» couvert. En fait, et le plus souvent, les CDS ne constituent que des paris
» « directionnels » à but spéculatif. Les établissements financiers ont
» recouru jusqu’à plus soif à de tels paris portant sur leur bonne santé
» respective : la somme du montant des contrats représente environ dix fois
» les pertes qui seraient effectivement subies - je veux dire en l’absence de
» tels paris. Les CDS ont donc démultiplié artificiellement par dix le risque
» réel qui préexistait à leur création, créant ainsi le monstrueux contraire
» d’une assurance.
»
» L’été dernier, quand le crédit s’est tari, les établissements financiers
» se sont retrouvés englués dans la toile d’interdépendance que les
» Credit-Default Swaps avait créée entre eux. Cette interdépendance a
» contribué à fragiliser la partie du système financier qui avait été
» épargnée par la crise du subprime puisque la chute de l’un d’entre eux
» risque de se répercuter alors à l’ensemble des autres avec lesquels il est
» interconnecté, créant un risque systémique de type « dominos ».
»
» Le 2 avril, Ben Bernanke, le président de la Fed, déclarait dans une
» allocution devant le Congrès : « La faillite soudaine de Bear Stearns
» aurait débouché sur un débouclage chaotique de positions sur ces marchés.
» Elle aurait aussi jeté la suspicion sur les positions financières de
» certaines parmi les milliers de contreparties de Bear Stearns ». La
» faillite de Bear Stearns aurait forcé au débouclage de l’ensemble des CDS
» dont elle faisait l’objet, c’est-à-dire à la réconciliation des positions
» de l’ensemble des établissements qui s’étaient engagés dans de tels
» contrats, l’insolvabilité de l’un des vendeurs pouvant alors se répercuter
» sur toute la longueur de la chaîne.
»
» Il y a quelques jours, un commentateur sur un blog financier faisait
» observer à propos des CDS qu’il s’agit avec eux de « probabilités
» conditionnelles », la condition en question étant le fait que le marché
» soit encore opérationnel lorsque les défaillances se manifestent. « Comment
» imaginer », disait-il, « que Goldman Sachs étant en défaut de paiement,
» Lehman Brothers [toujours en vie à l’époque] puisse me verser les sommes
» qu’il me doit sur les CDS qu’il m’a vendus > Pas @#%& très probable ! »
»
» Paul Jorion.

Le piege des CDS

par Alix, mardi 30 septembre 2008, 17:23 (il y a 5893 jours) @ ilanoe

» que sont les CDS au juste et quels sont leurs implications sur le systeme
» financier >

Goldman, Morgan et le piège des CDS, par Paul Jorion.
Les cours de Goldman Sachs et Morgan Stanley ont été fortement attaqués hier. « Qu’est-ce qui fait que leurs actions baissent > Le fait que le coût des Credit-Default Swaps sur ces firmes augmente. »

Par Paul Jorion, 17 septembre 2008 :

Au moment où j’écris, les titres de Goldman Sachs et de Morgan Stanley, les deux grands courtiers / banques d’investissement encore en vie, sont attaqués : -20,05 % pour la première, -28,40 % pour la seconde. Pourquoi, puisque leurs chiffres à elles ne sont pas alarmants > Parce que le sentiment général est, primo, que ça va mal pour tout le monde, secundo, que la rentabilité de ce genre d’affaires s’est envolée en fumée.

Qu’est-ce qui fait que leurs actions baissent > Le fait que le coût des Credit-Default Swaps [1] sur ces firmes augmente. Pourquoi continuer à acheter des CDS quand la solvabilité de ceux qui les vendent est en question > Et, facteur aggravant, le fait que comme il s’agit d’un marché non-régulé, personne n’est chargé de vérifier cette solvabilité, de la même manière que personne n’a jamais vérifié si les vendeurs de CDS disposaient des réserves suffisantes en cas de pépin. Ceux d’entre vous qui commentez mes billets vont tout particulièrement apprécier la citation suivante. Il s’agit d’un certain Mr. Uderitz, un vendeur de CDS. Le passage est extrait d’un article publié en mars dernier dans le Wall Street Journal :

Donald Uderitz, le gestionnaire du fonds d’investissement spéculatif [CDO Plus Master Fund Ltd.], dit qu’il pensait que la probabilité était très faible qu’il ait jamais à débourser pour honorer ces assurances [qu’il vendait sous la forme de CDS] destinées à couvrir les pertes des CDO. Il expliquait dans un entretien qu’il avait acheté la firme pour encaisser les commissions que les banques verseraient à son fonds d’investissement, à savoir 5,5 % du montant notionnel de 10 millions de dollars du [Credit-Default] swap de Citigroup et 2,75 % de Wachovia. Mr. Uderitz dit que maintenant il se sent « couillonné » (suckered). [2]

Mettez-vous à sa place !

Les CDS ont joué un rôle essentiel dans la constitution de ce qu’on appelle les produits financiers « synthétiques », où il faut comprendre « synthétique » dans son sens courant : « créé de toutes pièces en vue de reproduire l’équivalent d’un produit naturel ». La vogue des produits synthétiques est due au fait qu’il est très aisé d’utiliser le principe de l’assurance pour mimer n’importe quelle opération qui peut déboucher sur un gain. Je prends l’exemple de l’achat d’une action en bourse. Si j’achète une action à un prix X et que ce prix augmente ensuite, je bénéficie de ce gain. Si j’avais procédé autrement : si j’avais contracté une assurance qui me rembourse de la « perte » que j’estime subir du fait que le cours de l’action de cette société grimpe, j’aurais reconstitué « synthétiquement » un produit financier présentant le même rendement (moins le montant de la prime) que celui d’une action d’une société, sans jamais en avoir acheté aucune. Le montant de la prime constitue bien entendu une charge, ceci dit, dans le cas des CDS, divers avantages fiscaux et de présentation des chiffres au bilan, compensent largement cette dépense supplémentaire.

Ce sont ces avantages qui expliquent pourquoi les CDS furent utilisés pour créer des Collateralized-Debt Obligations (CDO) synthétiques. Au lieu d’être constitués comme les CDO proprement dits de « tranches » d’Asset-Backed Securities (ABS) regroupées en un seul instrument, les CDO synthétiques étaient des CDS mimant le comportement des CDO. De même, les « ABX », dont il fut longuement question dans L’implosion (Jorion 2008 : 108 - 133), du fait que leur cours servit de baromètre de la crise des subprimes à ses débuts, étaient des CDS qui assuraient leur acheteur contre les pertes hypothétiques subies par un indice représentant un panier d’ABS adossées à des prêts subprime. Les CDS portant sur des indices financiers et des instruments de dette représentent à peu près la moitié du marché.

J’expliquais en juin, dans Lehman Brothers : est-on reparti pour un tour >

La chute de Lehman Brothers serait une très très mauvaise nouvelle pour le monde financier. Primo, parce qu’on avait dit à propos de Bear Stearns : « On pourra faire ça une fois mais pas deux », en pensant essentiellement aux 28 milliards de dollars avancés par la Fed pour financer l’opération. Or il était apparu dans les jours qui suivirent que l’identité du chevalier blanc J.P. Morgan Chase n’avait pas été indifférente au déroulement des événements car c’est cette banque qui est le plus impliquée dans la garantie des Credit-Default Swaps, ces paris que font les établissements financiers quant à la bonne santé de leurs confrères, et c’était donc elle qui aurait subi le plus grand choc au cas où Bear Stearns avait fait faillite, ce qui avait fait dire à certains que ce n’était pas tant Bear Stearns qui avait été sauvée in extremis le 16 mars mais J.P. Morgan elle-même. Mauvaise nouvelle secundo parce qu’arriverait-on même à sauver in extremis Lehman Brothers comme on a pu le faire avec Bear Stearns, des trois qui resteraient en piste à Wall Street, il s’en trouverait automatiquement une qui serait cette fois « la plus petite des trois grandes banques d’affaires de Wall Street », mettant en évidence que la spirale infernale est toujours là bien présente et qu’on serait à nouveau prêt à partir pour un tour.

Les autorités se sont bien entendu inquiétées de la fragilité du marché des Credit-Default Swaps et de l’existence du coup d’un risque systémique, mais son opacité faisait que l’ampleur éventuelle de ce risque ne pouvait pas être mesurée. Aussitôt après le sauvetage de justesse de Bear Stearns en mars, les régulateurs ont commencé à faire pression sur l’ensemble des vendeurs de CDS pour qu’ils se concertent en vue d’assurer dorénavant une meilleure transparence du marché. L’option la plus naturelle était de mettre sur pied un marché organisé par lequel les parties devraient désormais passer. Une « chambre de compensation » mettrait les parties en présence, collectant sur des comptes individuels les marges servant de provisions, réconciliant ces comptes en fin de journée, assurant la publicité des opérations, et ainsi de suite.

Un marché organisé permettrait à chacune des parties engagées de savoir avec précision qui contracte avec qui et encouragerait les contractants liés « en bout de chaîne » à traiter directement l’un avec l’autre, éliminant les intermédiaires qui ne contribuent qu’à accroître la fragilité de la chaîne en y introduisant sans nécessité des maillons supplémentaires.

Les vendeurs de CDS résistèrent initialement à ces pressions, les contrats de gré à gré leur permettant - lorsque les acheteurs sont mal informés - de percevoir des commissions et des frais artificiellement gonflés. Autre facteur contribuant à leur manque d’enthousiasme, la concurrence entre les marchés organisés déjà en existence, et en particulier les marchés à terme tout disposés à étendre leur emprise au marché des CDS, et les acteurs traditionnels de ce marché : banques d’affaires et grandes banques commerciales américaines et européennes, déterminées à défendre leur manière de faire habituelle. Les banques se mirent d’accord pour créer Clearing Corp., un marché organisé des CDS, dont la naissance était prévue pour la fin de ce mois-ci. La priorité aurait été donnée à une réduction du volume total des contrats en réconciliant « multilatéralement » les positions qui s’annulent en bout de chaîne.

Tout le monde a été pris de court. Certains ne croyaient cependant pas à la viabilité du projet : le 8 mai, la compagnie d’assurance American International Group (AIG) - celle qui fut « semi- » nationalisée hier - prenait les devants en passant aux profits et pertes un portefeuille de CDS dont elle était l’acheteur, pour un montant de 9,1 milliards de dollars. Ce qui ne l’a pas empêchée bien sûr d’être, elle aussi, prise au dépourvu.

Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain > (La Découverte : 2007).

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