Analyse de marché (1)
Source: Oddo et Cie.
Les marchés sinterrogent enfin sur lévolution du cycle économique
Après une période caractérisée, de façon très étonnante, par lespoir dun coup de baguette magique de la FED ouvrant la voie à une détente monétaire, les marchés sont revenus à des préoccupations plus conformes à la réalité. Or, celle-ci nest pas bonne pour linflation. Les progressions de salaires dans les entreprises américaines, au premier semestre 2006, ont été exceptionnellement élevées. Pire, les prix, qui ont quand même nettement progressé ainsi que la productivité, ne couvrent plus les coûts salariaux.
Pourtant, si les marges des sociétés ont logiquement baissé, elles ont bien résisté à la flambée des salaires.
Les résultats du second trimestre ont ainsi plutôt rassuré les investisseurs et ont soutenu les cours pendant lété. Mais le retournement du cycle est bien engagé. Il serait très étonnant que les marchés y résistent à lavenir, alors que, dans le passé, les retournements de cycle ont entraîné, en moyenne, des baisses dindices de quelque 30%.
Notre schéma économique très réservé de fin 2005, basé sur les comptes des entreprises est désormais confirmé.
Sans la moindre équivoque, tout se passe comme prévu dans le déroulement du cycle aux États-Unis.
La pénurie de main-duvre qualifiée qui avait déjà provoqué la récession de 2001, commence à peser sérieusement sur les coûts des entreprises depuis le premier semestre 2006. Comme avait averti M. Ben Bernanke en janvier 2006, les coûts salariaux ont rattrapé la productivité. Comme lavait également rappelé le gouverneur de la Banque de Dallas en août dernier, le manque de "compétences" disponibles devait être gardé en ligne de mire pour apprécier linflation.
Les chiffres communiqués par le ministère du travail américain pour le premier semestre 2006 ont bien traduit dans les faits les appréhensions des autorités monétaires. Avec des progressions de salaires de 13.7 et 6.6% en rythme annuel sur les deux premiers trimestres de 2006, il était difficile à la productivité de continuer à couvrir les hausses de salaires. Les coûts
salariaux unitaires ont en effet progressé de respectivement 9 et 4.9% au premier et deuxième trimestre 2006. Compte tenu que les prix pratiqués par les entreprises ont, de leur côté, déjà répercuté une partie de la hausse des salaires, on ne voit pas comment le mouvement se calmerait naturellement de lui-même, sous forme "datterrissage en douceur".
Dès lors, il est très improbable que la FED entame prochainement une détente dans sa politique monétaire. Le problème central des coûts salariaux nest pas réglé. Au mieux, les taux directeurs ne baisseront pas.
Dans lhypothèse dune récession limpact sur les marchés irait au-delà de la baisse du mois de mai.
La récession américaine est dautant moins acquise que la Banque Centrale et le Trésor chercheront autant que possible à léviter. Mais lexpérience du passé rappelle que la maîtrise des dérapages des coûts salariaux sest toujours soldée par une récession, à plus ou moins brève échéance. Cest dailleurs ce que le marché obligataire envisage en présentant, depuis quelques semaines, une courbe des taux clairement inversée. Par ailleurs les économistes les plus sérieux commencent eux aussi à accorder une probabilité de récession non négligeable aux États-Unis, de lordre de 40%.