La crise du crédit paralyse l'Amérique (Securibourse)

par chris, lundi 10 mars 2008, 19:19 (il y a 6098 jours)

Le Figaro - Pierre-Yves Dugua
07/03/2008

La banque centrale a annoncé hier une nouvelle opération visant à encourager les banques à se prêter des liquidités.

La crise de confiance qui sévit sur les marchés financiers depuis l'été dernier s'aggrave. Le blocage manifeste des circuits du crédit est en train de précipiter le basculement de l'Amérique dans la récession. Après l'annonce de nouvelles destructions d'emplois aux États-Unis en février, la Fed a donc surpris les opérateurs hier en annonçant une nouvelle injection massive de liquidités dans le système bancaire.

La banque centrale a porté de 60 à 100 milliards de dollars le montant de ses adjudications prévues en mars. Pour sa part, la Banque centrale européenne s'est dite prête hier à servir des dollars si nécessaire. Cela devrait donner aux banques un peu d'oxygène pour les inciter à prêter davan­tage. Les fortes baisses de taux directeurs pratiquées depuis septembre, doublées de précédentes injections de liquidités, n'ont pas suffi à rétablir la confiance.

Comme l'explique John Thain, patron de la banque d'investissement Merrill Lynch (lire ci-dessous), le feu parti des créances immobilières s'est propagé à tous les marchés de crédit aux particuliers, aux municipa­lités et aux entreprises.

La liste des victimes s'allonge

Dans la pratique, loin de baisser, le coût effectif du crédit aux États-Unis augmente pour beaucoup d'emprunteurs. La liste des victimes de cette crise sans précédent s'allonge. On y trouve les plus solides multinationales, des collectivités locales, des entités publiques et des particuliers à la recherche d'un financement. L'agence de l'État de Pennsylvanie a par exemple renoncé à ­accorder des prêts aux étudiants. En dépit de la garantie de l'Oncle Sam, elle ne trouve plus preneur sur le marché pour ce type de créance. L'État de Virginie occidentale envisage d'augmenter les péages sur ses autoroutes pour compenser la hausse de taux d'intérêt qu'il subit depuis que l'assureur qui garantissait ses émissions obligataires, Financial Guaranty Insurance, est jugé fragilisé par la crise.

Le mois dernier, le port de New York et du New Jersey, qui d'ordinaire trouvait des ressources à très court terme sur le marché à 4 %, a dû payer 20 % ! L'État du Wisconsin s'est trouvé dans la même situation, voyant son taux passer de 5,2 à 10 %…

Les banques qui jusqu'à présent se substituaient au marché pour prendre pendant quelques jours à leur compte le risque de ces bons clients refusent désormais de le faire. Elles sont elles-mêmes à court de fonds propres. Elles ne peuvent plus se permettre d'accumuler de risques sur leurs bilans.

Des centaines d'emprunteurs qui n'ont rien à voir avec l'immobilier, comme le Musée d'art moderne de New York ou la Ville de Buffalo en font les frais. Même les emprunteurs de meilleur standing sont affectés. General Electric, qui jouit pourtant d'une notation « AAA », gage de la meilleure solidité financière, doit payer, sur les 3,35 milliards de dollars d'obligations à cinq ans émises la semaine dernière, 17 millions de dollars d'intérêts annuels de plus que s'il avait emprunté il y a neuf mois. En dépit d'une baisse de taux directeurs de la Fed de 2,25 % depuis septembre, la prime de risque exigée par le marché sur les obligations d'entreprises privées est au plus haut depuis 1997.

Des petites banques fragilisées

Les banques américaines ont découvert depuis l'automne qu'elles avaient considérablement sous-estimé les risques qu'elles avaient pris. Cette gigantesque erreur collective tient en partie à leur confiance aveugle dans des systèmes de notation de risques de créances et de prêts titrisés qui se sont révélés inopérants.

La Fed a compris que les 181 milliards de dollars de dévalorisations d'actifs bancaires déjà annoncés depuis le début de la crise ne couvraient toujours pas l'ensemble du problème. D'autres fortes dépréciations sont vraisemblables, car l'immobilier n'a pas touché le fonds. Dans le secteur résidentiel, les saisies de logements battent des records. Quant à l'immobilier commercial, la valeur des immeubles de bureaux et des centres commerciaux commence à dégringoler, ce qui fragilise au passage des centaines de petites banques qui les avaient financés.

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